LA TOUR DE PORCHERES

     LA TOUR DE PORCHÈRES
   Saint Michel l'Observatoire
  
    



On ignore si c’est à la fin du XII e ou au début du XIII e Siècle que la Tour de Porchères a été édifiée, mais en tout état de cause, elle domine toujours, à notre époque, un très vaste secteur géographique avec vue panoramique qui peut expliquer l’origine de sa construction : une tour de guet et de veille peut-être. Mais bien des suppositions et des supputations restent d’actualité, comme une tour grange c'est-à-dire utilisée à des fins agricoles. L’hypothèse  ‘’Tour de Garde’’ est accréditée par la présence aux trois fenêtres supérieures, de banquettes à mi-épaisseur des murs, assorties de boulins (trous dans le mur destinés à la construction d’échafaudages) servant sans doute à édifier des plateformes provisoires  à l’extérieur.  



Son toit, culminant à 13 m de hauteur, est couvert de lauses. Elle regarde au nord-est Mane, Forcalquier, Lurs et, festonnant l'horizon, la chaîne des Alpes. A l’est elle voit la plaine de Mane, Saint-Maime, Dauphin, la vallée du Largue, la Roche Amère, le Plateau de Valensole et les montagnes du Var. Au sud, sa vue s’étend vers Saint-Martin-les-Eaux, Villemus et les crêtes du Luberon fuyant vers Céreste et le Rhône.



Sans aucune trace officielle de son érection,  nombre de chercheurs ont émis des hypothèses sur sa première destination.

Bâtie à même le rocher, avec des murs très épais de 1,30 m  elle comporte deux niveaux : le rez-de-chaussée voûté en berceau brisé  (voûte qui présente la face de son arc -ou intrados- faite d'une courbure en deux parties se rejoignant au sommet en formant une sorte de pointe) et un étage identique.



La ’’verrue’’ se trouvant sur la face nord-est, et servant de sacristie a été ajoutée lors de la transformation de la tour en chapelle. (4 photos ci-dessous)

                    


        


Aux alentours de l’ouvrage, se trouvait un hameau spécialisé dans l’élevage de porcs, qui devait être important puisque un grand nombre d’enclos ont été dénombrés par Pierre Martel, fondateur de l’association ALPES DE LUMIERES. Ce hameau vivait de ces élevages, nourris grâce à l’abondance des glands fournis par les chênes, mais aussi peut-être  grâce à  l’activité de la carrière de Mane et à la présence d’une source jaillissant non loin de là.

Entre sa construction et 1550, on ne sait à peu-près rien de la tour. C’est à cette date que la famille de Sebastiani en devient propriétaire. Quelques années plus tard, en 1591 une garnison de défense s'installe lors des luttes de la Ligue (guerres de religion du début du XVII e  S.). La peste, qui sévit en 1631, ravage le hameau, et la Tour de Porchères sert alors de refuge aux familles survivantes...

Longtemps après, en 1834,  Fortuné de Berluc-Perrussis acquiert cette Tour de   Porchères. Son souhait est de la transformer en chapelle. Il décède avant de voir la fin de cette transformation.
Après le décès de son père, en 1854, Léon de Berluc-Perrussis en devient propriétaire et termine les travaux initiés par celui-ci.


L'autel de la chapelle
Statue de Sainte Thérèse de Lisieux










 
  
           La porte d'entrée de la tour et de la chapelle

Elle devient chapelle, le 29 septembre 1861... « M. l'Abbé Terrasson, Chanoine doyen de Forcalquier a procédé, en vertu de l'autorisation de Mgr. Marie-Julien Meirieu, Evêque de Digne, à la bénédiction de la Chapelle, par nous fondée dans l'ancien donjon seigneurial de Porchères...  le nouveau sanctuaire a été dédié à l'Immaculée Conception de la Vierge Marie, sous le patronage secondaire de Sainte Hélène...Le procès verbal de cette cérémonie, a été consigné par M. l’Abbé Terrasson en tête d'un registre spécial où seront successivement consignés tous les faits importants qui s'accompliront à N. D. Porchères ». 
Depuis cette bénédiction, la Chapelle Tour de Porchères a vécu au rythme des calendriers liturgiques, et des cérémonies familiales : baptêmes, communions, fiançailles, mariages, funérailles et messes de mémoire. A noter que l’Abbé Terrasson a reçu le 10 novembre 1858 au Plan-de-Porchères des mains de M. de Berluc-Perrussis une médaille d’honneur de la Société Française d’Archéologie, qui lui avait été attribuée en 1857.

Le 2 décembre 1902, Léon de Berluc-Perrussis décède, et le 4 décembre, ses funérailles sont célébrées à la Tour de Porchères, où il est enterré à côté de son père Fortuné de Berluc Perrussis: «  la Chapelle était tendue de noir...une foule nombreuse était venue rendre un dernier hommage à notre cher et regretté défunt »...

L'hommage à Léon de Berluc-Perrussis
                             
Sa nièce, devient alors propriétaire de la Tour de Porchères. Les traditions se poursuivent, et en 1941, pour la fête du 15 Août, les vêpres ont été chantées à Porchères: « ... puis la colonie de vacances de N..D. du Mont et les fidèles du quartier, sont allés en procession, de la chapelle à la Bonne Chère, puis à l'oratoire de Ste. Anne. Cette pieuse cérémonie qui réunissait environ 200 personnes fut pleine de recueillement et de piété... »
               
Durant la seconde guerre, en 1944, la Tour de Porchères, située non loin d’un point de parachutages, a servi de cache d'armes à la Résistance.
Plus près de nous, en décembre 2002, on célébrait le centenaire de la mort de Léon de Berluc-Perrussis. A cette occasion lors d'un rassemblement à la Tour de Porchères, un de ses  sonnets,  gravé sur cuivre a été apposé dans la Chapelle, et on rappelait que le grand Maître Mistral, son ami, confiait: « Il a mené à mes côtés la barque du Félibrige ».
  

                            



Tour grange ou tour de garde, la Tour de Porchères, propriété des descendants de Fortuné de Berluc-Perrussis,  a encore bien des secrets savamment enfouis dans les interstices de ses vénérables pierres.

Passant, arrête-toi, penche toi vers elle, prête l’oreille, elle t’en chuchotera  peut-être un ou deux ...



                                                                            
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Article recomposé  sur la base d’un texte, et avec ses indications, de François CHODZKO.
Décembre 2014


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La Tour de Porchères est ouverte aux visites durant les journées du patrimoine. Les visites sont également possibles en dehors de ces journées, il faut en formuler la demande auprès de l’association des Amis de Saint Michel Lincel pour convenir d’un rendez-vous
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  Ci-dessous le texte (et sa traduction en Français) du  sonnet en guise d’épitaphe « pour son tombeau 
  composé par Léon de Berluc-Perrussis, gravé sur cette plaque de cuivre scellée au-dessus de son    
  tombeau.

  


                               PER UN CROS                                                                   POUR UNE TOMBE
       QUE S'ALESTIS DINS UNO CAPELLO DOU                         QUE L'ON PRÉPARE  DANS UNE                                                                                                            CHAPELLE    RURALE  PROVENÇALE
                     CAMPESTRE PROUVENÇAU                               
                                                                            

    Mounde, oublido-me, dins ma sourno bori!         Monde oublie-moi dans ma sombre demeure!
    Mai qu'un rai d'estiéu rigue à la paret;                  Pourvu qu'un rayon d'été sourie sur la muraille
    Qu'un cant de cigalo, un brama d'aret                 Qu'un chant de cigale, un bêlement de bélier
    Vengon piei bressa moun long dourmitori;           Viennent bercer mon long sommeil;

    Emai qu'en passant, li gent de l'endré,                  Pourvu qu'en passant les gens du village,
    De mi viei parènt lausant lou noum flori,               De mes vieux parents louant le nom respecté,
    Fâgon: « Eu, pereu, ero bon e dré,                      Disent: « Lui aussi était bon et droit,
    E d'aquel austau gardaren memori »;                   Et de cette maison nous garderons mémoire. »

    Mai que quand vendra, de-fes, dins l'escur,         Pourvu que parfois, lorsqu'elle viendra sur le soir
    Prega vers mon cros, ma chato, au front pur        Prier vers la tombe paternelle, ma fille au front pur
    Mescle uno lagremo à l'aigo-signado, (*)            Mêle une larme à l'eau bénite. (*)

    En pas t'attendrai, jour d'eterne gau,                    Je t'attendrai en paix, jour de joie éternelle
    Ounte, emé li reire, emé la meinado,                   Où avec les aïeux, avec l'enfant
    Bastiren damount un noveù fougau.                     Nous bâtirons un nouveau foyer.
                                              
                                               Porchères-en-Forcalquierois.      L.B.P.
           
                                                                              (*) Hélas! La jeune fille mourut avant son père.
           
                                                                                                                     


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